Bienvenue au Casse-Dalle !

Le Casse-dalle. C’est sous ce sobriquet que ce cache un bar se trouvant dans une rue peu fréquentable du niveau 0. La casse-dalle se présente comme une salle de taille moyenne, avec un grand bar arpentant 2 mur complet, avec 5 à 6 tables ici et là, et enfin moult chaise autour du bar et des tables.

Le soleil est déjà couché depuis un certain temps. Et on ne peux pas dire qu’il y est foule ce soir. Accoudé au bar, un homme Ivre mort répète une chose inaudible à l’oreille peu expérimentée. Quelques clients dispersés dans la salle, certains partent, d’autre rentrent. Le patron du bar, M. Barkelner, homme d‘une quarantaine d‘année, presque chauve, célibataire (il le répète tant de fois…) , toujours derrière son comptoir nettoie une chope de bière vide, encore et encore, l’air pensif. Il serra vite tiré de sa rêverie par une femme, posée près de lui.

« Une semaine… Il reviendra pas, pas vrai ? »

Le patron resta silencieux. C’était sans doute vrai. D’habitude ces absences duraient quoi ? 2 ou 3 jours ? Mais là…Là ça faisait une semaines déjà qu’il n’était pas venu avec l’heure habituelle. Qu’il n’avait pas fait ces cocktails, l'élément attractif du casse-dalle, cocktail grandement apprécier par ces dames. Ah moins que ce ne soit lui qui ..? Bah, ça n’avait plus grande importance.

La jeune femme soupira. Elle tenait en main son whisky entrechoquant les glaçons contre le verre qui émettaient un son cristallin. D’une petite voix, elle soupira :

« Il s’est fait avoir cette fois… Puis elle reprit, d’un ton calme : Bon, je vais aller travailler ! »

Elle finit son verre, cul sec, paya sa consommation et sortie. Tandis qu’elle s’enfonçait dans la noirceur de la nuit, le patron regardait la pièce, pratiquement vide, tout en continuant à astiquer encore et encore cette même chope. D’un coup, il entendit quelque chose. Ça venait de derrière. M. Barkelner reconnu le bruit singulier de la porte de son arrière boutique. Mais il l’avais fermé a clef ! Il en était certain. Et les deux seules clefs… Il avait la première et la seconde…

Il l’avait aussi ! Son seul et unique membre du personnel l’avait oublié la dernière fois (funeste signe ?) ! Alors c’était… Un voyou qui venait prendre en douce de l’alcool des réserves ! Ah non ! C’était vraiment pas le moment…Armé de son courage et de sa chope de bière vide, l’homme alla derrière. Ce bruit ! Pas de doute ! C’est la réserve ! Il vit la faible lumière qui sortait de la réserve s’éteindre.

« Oh les p’tits !!! » Grommelait M. Barkelner.

Il arriva devant la salle encore plongée dans les ténèbres. L’intrus fut un pas, bien audible. Un amateur qui n’avait même pas repérer M. Barkelner. UN amateur, pas plus.. Le courage du barman ne s’en trouva que décuplé.

Il entra en trombe dans la salle, jetant sa chope de bière en direction de l’intrus et hurlât :

« Tu crois et qu’j’t’aurais pas, hein ? P’tit vandale ! p’tit con !! p’tit salaupiot !!! P’TIT… !! »

La choppe s’écrasa contre quelque chose. L’intrus avait bien du dire quelque chose, Mais M. Barkelner criait bien trop fort pour que quoi que ce soit d’autre puissent être entendu. Allumant la lumière d’un geste vif, il tenait à voir le visage de sa victime. Mais le spectacle le laissa sans voix.

Accroupi juste en dessous dans un coin de pièce, avec des éclat de verre partout sur lui, avec la marque de la chope éclatée juste au dessus se tenait…

« P’TIT !!! P’tit… P’tit gars ?!? »
Le jeune homme releva la tête, timidement, craignant les autres chopes volantes.

« Sa… Salut patron ! Tu reçois toujours ton personnel comme ça après un… retard ? »

Le patron restait bouche bée. Un peu plus et il aurait du dire que son employé avait été tué, oui, mais par lui. Amsel se relava, enlevant les débris de l’ex-chope de ces cheveux et regarda l’endroit de rencontre malheureuse entre la chope et le mur.

« Tu vises bien patron ! Un peu plus, et c’était ma tête… »

Amsel adressa un grand sourire innocent à son patron.

« J’ai fait l’inventaire ! On a plus de Vodka ! On devrait vite pouvoir en avoir… bon, je rajoute aussi une chope, déjà qu’on en a des fois pas assez… Mais les comptes avant… Est-ce que c’est possible… »

Tout en parlant, il alla au grand livre de compte, livre au chaque soir les comptes de la journée étaient fait.

« Voyons… Huuummm… ça va pas fort ces dernier jours… Et… Le « pots d’honneur en mémoires du p’tit gars » n’a rien arrangé. Vous m’enterez trop vite. »

Reposant le livre, Amsel se dirigea vers le bar lui-même.

« J’vais à mon poste, on ferra le ménage tout à l’heure. »

M. Barkelner était resté bouche bée pendant tout ce temps, observant sans réagir. Soudain, il se réveilla : mais trop tard Amsel était parti. Ah ! C’était un rêve ou pas ? Il se précipita vers le bar. Mais non, ce n’était pas un rêve.

« P’tit… p’tit gars !! T’es pas mort !
- Pas au dernière nouvelles… Mais la chope de tout à l’heure…
- Ta !! T‘es en r‘tard !! »

Amsel regarda sa montre
« Si peu…
- Une semaines !!!
- J’avais à faire… Des obligations je dirais… Désolé de pas…
- PAULIIIIINE ! »

L’homme ivre mort sur le coin de la table venait de se réveiller faisant au passage sursauter toute l’assemblé présente. Considérant que la conversation était terminé, Amsel se dirigea vers l’homme en question.

« L’était belle… Snirf… Ma Pauline ! Toujours avec moi…
- Oui je sais, répondait Amsel. Sa perte est une triste nouvelle pour nous tous.
- Et l’était fidèLE ! Ma Pauline… Toujours gentille… Et tendre…
- Certes… Mais ça fait quoi, 2 semaines ? Elle ne serait pas heureuse de vous savoir triste comme ça…
- et elle était si douce…
- Oui oui… »

Amsel s’en alla près de son plan de travail habituel. Ça avait été très dur de faire acheter tant de produit au patron pour ces fameux cocktails. Et d’avoir un plan de travail pour lui. Il prit ici et là quelques bouteilles, un verre, et commença la préparation d’un de ceux dont il avait le secret. L’homme, toujours pleurait en parlant de Pauline, combien elle lui manquait, combien sa mort était une cruelle disparitions. Encore, encore, toujours toujours.
Amsel revint, le verre plein.

« Tenez, en l’honneur de Pauline… Un cocktail K.O…
- C’est bientôt vrai qu’ma vie est chaotique sans Pau… Snirf !! Pauline.
- C’était, en effet, une bien brave chienne.
- LA plus BRAVE p’tite bête que j’ai JAMAIS EU !!! »

Cul sec, l’homme bu, et aussi sec, il s’effondra sur la table, commençant à émettre un léger ronflement, signe de son coté vivant.

Amsel regarda l’air neutre.

« Gonflant celui là avec son teckel… »

Le bruit causé par tout ce remue-ménage avait attiré les yeux de tous sur Amsel. Il le remarqua vite et glissa, faisant un signe de main.

« Heu... salut ! »

Vielena avait eu une très longue et dure journée de travail au garage. Cela aurait pu signifier une grosse entrée d'argent et un minimum d'aisance. Mais non. En fait, l'engin que lui avait confié ce vieux con, cette poubelle qu'il appelait "sa chérie", lui avait pris toute la journée. C'était le modèle de voiture le plus pourri et le plus vieux qu'elle n'avait jamais vu. La "chérie" du vieux bonhomme était particulièrement indocile et capricieuse. La prochaine fois que le vieux pointerait le bout de son nez au garage, elle l'enverrait ballader...
Et bien non, elle ne l'enverrait pas ballader. Il ferait son air de petit chien battu et elle prendrait la voiture et elle la réparerait.

En circulant dans une vieille rue mal famée du Niveau 0, les mains dans les poches de sa veste usée, Vielena soupira.
Elle allait dépenser le peu d'argent qu'elle avait gagné ce jour dans un bar, comme n'importe quel sagouin du coin.
Nouveau soupir. Bon, elle avait quand même des réserves, elle n'était pas si superficielle que ça...

La jeune femme s'arrêta devant un bouge qui n'avait pas l'air trop cher ni trop dangereux. Le "Casse-Dalle". L'enseigne arracha un sourire à Vielena et elle entra.

"Un bière, Patron!"

Les yeux passèrent d'un jeune homme a l'air un peu géné à Vielena. Sans s'en préocuper, la jeune femme alla s'assoir à une table libre. Une fois assise, elle s'étira longuement en bâillant et elle fit craquer les articulations de son bras droit, qui ne faisait pas vraiment le même bruit que les os. Vielena pensa qu'elle allait sans doute devoir huiler tout ça très prochainement.
Elle soupira de nouveau. Encore un sacré coup au porte-feuille, ça...

L’entrée, salvatrice pensait Amsel, de la jeune femme avait transféré les regards de lui à elle. Les gens présent avaient fixé la jeune femme quelques minutes, puis tous était retourné à leurs occupations habituelle. Cela rassurait le jeune homme. Être la cible de tout les regards ne lui plaisait pas. Vraiment pas. Bien sur, il pensait bien que son retour de la tombe n’allait pas faire si peu de vague et que petit à petit, au grand plaisir de son patron, nombre de curieux viendraient regarder le revenant.

Peu importait sur le moment. Pour le moment, La jeune femme assise la bas avait demandé une bière. Amsel regarda dans le placard où sont couramment entreposée une partie des bières.

Vide.

Il regarda son patron une seconde. celui-ci ne bougeait pas un pouce. La jeune femme avait pourtant dit « patron une bière », mais bon. En soupirant, Amsel lâcha :

« J’vais à la réserve patron…
- Et ? Grommelait l’homme
- C‘est que j‘ai pas une envies débordante de me prendre une chope en pleine figure... »

Le patron grogna faiblement, certains auraient pu percevoir qu‘il rougissait… D‘autre auraient dit que c‘était l‘alcool ambiant de ces veines qui donnait un coup de chaud. Mais les clients n‘avaient rien entendu ni vu, Amsel, lui partait souriant à la réserve, il adorait faire légèrement enrager son patron comme ça. C’était si amusant.
Quelques minutes plus tard, l’employé était de retour,des bouteilles de bière en verre plein les mains et les bras. Une fois le placard remplis, il en prit une, passa au-delà du comptoir et alla servir la jeune femme.

« Voilà pour vous, jolie demoiselle. Désolé de l’attente.» Disait-il en tendant une bouteille de bière.

Vielena avait attendu patiement sa commande arriver. Elle n'était pas pressée après tout. Mais elle n'entendit pas l'employé s'approcher d'elle et lorsqu'il posa la bière sur la table, elle sursauta si violemment qu'un nerf se coinça dans son épaule droite qu'elle était en train de manipuler.

"Hhmpfhhgh!"

Vielena se mordit la lèvre inférieure pour ne pas crier de douleur. Mais deux petites larmes lui vinrent aux yeux.
La jeune femme prit son poignet droit dans sa main et tira un grand coup sec sur son bras. La douleur à l'épaule disparut, mais un sinistre "klonk" retentit dans toute la salle.

Vielena sentit une sorte de grésillement dans l'oriculaire droit. Elle baissa les yeux sur sa main : le dit doigt était agités de frénétiques soubresauts.
D'un air particulièrement agaçé, la Rebelle frappa son poignet avec son poing gauche. Avec un bruit de ferraille défoncée, tout rentra à peu près dans l'ordre.

"C'est pas un huilage mais une bonne révision, qu'il te faut..." marmonna-t-elle.

Amsel pensait avoir quand même, vu pas mal de truc. De manière dense, il n’était pas très vieux, après tout. Mais là… Il mesurait avec un certain étonnement, la dangerosité d’une attente. Elle avait pourtant pas été bien longue ! Si ? Par réflexe quand la jeune femme c’était mis à bouger dans tout les sens et violemment il s’était écarté, emmenant avec lui la bière. Réflexe de pingre : une bière cassée : c’est une bière perdue. Mais aussi : une bière cassée, c’est des heures sup à nettoyer le planché.

Le « klonk » acheva les derniers indécis à se retourner pour voir ce qui se passait.

L'employé remarqua furtivement la douleur qui traversait la jeune femme avec sa grimace. Rapidement, il ajouta :

« J’vous offres la bière ! Mais vous êtes sur de pas vouloir quelque chose de plus fort ? ! »

Il s’aperçut alors que de nouveau il était, avec la demoiselle au centre de tout les regards.

* Flûte*

Enfin, le doigts de la dame bougeait à sa guise et fut réprimandé par des coup contre son poigné. Cette fois, c’était un silence comme peu avait était entendu qui régnait dans le Casse-Dalle.

Prenant une allure plus sérieuse qu’à la normale, le jeune homme toujours la bière à la main, essaya :

« Bon, ça suffit, le spectacles est term…
- T’es vivaaaaaaant ! »

La porte du Casse-Dalle venait de s’ouvrir à grand fracas. Et c’était la même jeune femme qui buvait un whisky il n’y a pas si longtemps qui entrait en galopant vers Amsel.

« Ah ! Prenez votre bière, vite ! Viiite !» Ajouta-t-il rapidement pour Vielena.

Aussitôt la bière sauvée, la jeune femme bondit au coup du jeune homme.

« On te croyais vraiment mort cette fois ! Pour de bon !! Qu’est-ce que tu faisais pendant que… Oh ! »

Elle venait de remarquer, à travers les fenêtres, l’homme qui allait être son client de début de soirée.

« Aller, je file, bise ! » et aussi vite venue, aussi vite repartie.

Amsel soupira, la tempête était passée. Au passage, il regarda furtivement autour de lui : plus personne ne les regardait. Le grand élan d’émotions que venait de montrer la jeune femme était chose commune, et la plupart des consommateur présent retournait à ces occupations…

Il se rapprocha de sa cliente, et puisque personne ne semblait écouter, il glissa rapidement.

« Vous avez un bien intéressant bras apparemment, jolie demoiselle. Quoi que pas très discret !»

Vielena leva enfin les yeux sur le jeune homme et lui sourit. Elle allait le remercier pour son offre si généreuse mais elle fut interrompue par le raclement des chaises qui se rapprochaient pour mieux entendre.

En voyant les clients s'approcher pour matter son bras, Vielena allait lancer un méchant "Quoi". Mais ce qui se passa fut plutôt déconcertant. Le jeune employé lui abandonna sa bière dans ses mains, comme s'il se débarrassait d'un bâton de dynamite, juste à temps pour que la jeune femme qui lui sautait dans les bras ne gâche pas la précieuse boisson.

Offerte par la maison? Il fallait en profiter de celle-là, pensa Vielena. Tandis que la prostituée bavait sur le jeune homme, Vielena but délicatement au goulot une gorgée d'alcool, ce qui donnait une drôle d'impression.

Lorsque la prostituée eut fini d'étrangler l'employé du bar, il s'adressa de nouveau à Vielena. Elle remarqua qu'il l'appelait toujours "jolie demoiselle" ce qui, à son goût, ne lui allait pas franchement. Quand on lui parlait de "jolie demoiselle", elle imaginait une de ces jouvencelles en robe blanche et chevelure blonde qui devaient se pavaner dans le quartier haut. Pas une femme torve, claudiquante et aux manières fortement masculines.

"Appelez-moi Vielena, dit-elle avec un ton légèrement autoritaire, pour régler le problème le plus simplement possible.
- Quant à mon bras... Blessure de guerre. Ah non! C'est vrai qu'il n'y a pas de guerre en ce moment."

Vielena se gratta l'arrière du crâne à la recherche d'un mensonge crédible...
Elle montrait ostensiblement qu'elle mentait par pure stratégie. D'un, elle pouvait placer une de ses stupides plaisanteries favorites, de deux, elle ne mentait pas réellement, de trois, elle évitait de dire la vérité et de quatre, lorsque l'interlocuteur était intelligent, il comprenait que c'était un sujet sur lequel il ne valait mieux pas s'attarder.
Vielena pensait sincèrement que les quatre points seraient remplis, même si elle ne comprenait pas comment un type intelligent pouvait être employé de bar.

"Bah! Accident bête..."

Et c'était presque vrai...
Vielena adressa un beau sourire qui découvrit ses dents blanches au jeune homme, savourant sa propre ironie.

"D'un ton peu convaincu, Amsel amorça :

" Un... Accident bête ? C'est que, en règle générale, les "accidents bêtes" (il mimait les guillemets avec les doigts) coûtent rarement un bras..."

Il tapa ces deux mains, comme pris d'une illumination divine.

" A moins de faire un métier vraiment dangereux... Enfin... Sans doute que cela ne me concerne pas. Qu'est-ce que j'en sais moi ? Après tout... Je suis juste un employé de bar... Et on peut pas vraiment dire que c'est un métier très dangereux. ha ha..."

Le dit employé regardait la jeune femme. Elle était assez grande, elle n'avait pas des manières très féminines, ni un style vestimentaire très féminin. Ca devait être entre autre pour ça qu'elle ne voulait pas être appelée "jolie demoiselle" : elle faisait clairement tout pour ne pas être appelée comme ça. D'où le prénom.

Seulement, il ne put s'empêcher de rire un peu...

" Vous donnez toujours votre prénom aux inconnus vous ?"

Elle lui avait dit ça sans réfléchir, et ça se voyait. Il repris un ton calme et finit :

" D’accord, va pour Vielena. Je tacherais de m'en souvenir."

Effectivement, le jeune serveur de bar ne devait pas risquer sa vie tous les jours. C'était pas si mal, comme vie. Car Vielena savait très exactement ce qu'était un "métier dangereux" et celui de serveur n'en faisant pas vraiment partie.

La jeune femme haussa les épaules autant pour elle-même que pour le jeune homme. Elle lui accorda un sourire avant de répondre :

"Le métier de garagiste est, par contre, plutôt dangereux..."

Ce n'était pas faux... C'était très fatiguant et on était jamais à l'abri d'un petit accident. La perte d'un bras était tout à fait plausible. Celle de la moitié du squelette, peut-être un peu moins...

La question suivante du jeune homme la surprit. Elle lui jeta un regard scrutateur pour essayer de déceler ce qui pouvait bouilloner dans son crâne. Elle ne it que le visage d'un charmant serveur de bar qui parlait certes d'une manière plutôt étrange.

"Ben, oui... Je donne mon prénom. Pourquoi? Il faut pas? C'est pas comme si j'avais toute une troupe d'assassins à mes trousses..."

*Quoique...*

Mais Vielena ne risquait pas grand chose en révélant son nom. C'était le nom qui lui servait pour sa couverture, son nom officiel. Dans le "milieu", tout le monde l'appelait "Son Ombre", même une majorité de Rebelles.

"C'est que vous, vous le donnez pas votre prénom?"

« Ooooooh… ! »

Ce « oh » tenait plus du gamin que de l’adulte. Amsel regardait sa cliente avec intérêt.

« Ainsi vous êtes garagiste ? Oui, je pense mieux comprendre à présent. »

Il eut un sourire aimable envers la jeune femme, la regardant dans les yeux. D’un coup, il lui sembla se souvenir de quelque chose : Il venait de dire quelque chose qui sans doute, aurait pus être mal pris. Son métier lui avait déjà apprit à se méfier de quoi dire aux gens. L’un prendrait sérieusement tout, l’autre non. Il se souvenait même d’un client qui avait une ardoise de dette assez grande pour racheter le bar mais celui ci croyait que le patron, pourtant bon ami, plaisantait en disant qu’il n’y aurait pas consommation ce soir. Ou encore…

Ah ! Quel malappris… Il se replongeait encore dans ces pensées idiotes alors qu’il regardait fixement quelqu’un dans les yeux ! D’ailleurs, la dernière fois…

Il secoua légèrement la tête, pour chasser ces pensées.

« Désolée, j’étais dans mes pensées ! »

*Mais quel crétin ! *

Et si elle prenait ça comme « Vous n’êtes pas assez intéressante, je préfère penser à autre chose. » Enfin… Il ne faudrait pas non plus qu’elle s’imagine des choses… Le patron avait fait promettre à Amsel de, s’il avait une petite amie/fiancé/épouse ne rien dire. Il avait achevé par un « ça serait mauvais pour la clientèle » sans que l’employé ait réellement comprit grand chose.

« Je veux dire que, ça me faisait penser à… Nan ! Ça n’a pas d’importance ! » Acheva-t-il brusquement.

Puis il se demanda quelques instants : Mais pourquoi tout ça… ? Quelles avaient été les pensées qui… Tandis qu’il semblait admirer le plafond depuis 5 minutes, Amsel regarda la jeune femme, l’air de connaître une illumination.

« Oui ! Je voulais dire que… En fait… Heu… Votre attitude est… En harmonie avec votre métier… Non pas que je pense que Garagiste soit exclusivement un métier d’homme… Mais je comprends que vous ne soyez pas non plus trop à cheval avec votre féminité. »

Dans son esprit, une voix lui disait « Alerte : Bourde colossale… »

« Ce que je veux dire !! C’est que… Je trouverais étrange que vous passiez du temps à vous maquiller et à prendre soin de vos mains sans arrêt si c’est pour passer la journée dans le cambouis ! Non pas qu’une femme ait spécialement besoin de ça ! C’est pas ce que je veux dire !! Mais à première vue, vous ne semblez pas trop vous soucier de votre manucure… Heu je veux dire ! Vous ne semblez pas portez un intérêt frappant à ce que les gens peuvent penser de vous et… »

La voix lui parlait à nouveau : « Niveau critique. Rattrapage impossible. »

Amsel resta quelque seconde blême. Assez pour que certains vampires lui envient ce teint pale. Sans bouger ne serait-ce qu’un cil, il demanda hasardeusement, d’une petite voix :

« Et… Il est loin votre garage ? »

Il avait un sourire gêné et crispé, ça se voyait que de toute son âme, il priait pour que la jeune femme ne prennent pas mal ce qui avait été dit, et qu’elle accepte ce changement de conversation.

D'abord, Vielena regarda le jeune homme parler et s'enliser dans des explications plus que confuses d'un air perplexe. De toute évidence, le jeune employé du bar essayait de faire remarquer que son allure allait plutôt bien avec sa profession tout en évitant de paraître goujat.

Ne comprenant pas vraiment pourquoi il prenait cette peine, elle le laissa parler, la bouche entrouverte.

Puis ce comportement l'attendrit et enfin l'amusa. Penser qu'on puisse la vexer en constatant son manque de féminité, oui, voilà qui était original. Si Vielena ne s'en était pas abstenu pour s'amuser un peu plus longtemps, elle aurait éclaté d'un rire qui aurait immédiatement pu détendre le jeune homme.

Mais au lieu de cela, elle se composa un visage sévère, outrée, juste histoire de jouer le jeu. Lorsque le jeune homme finit par une tentative désespérée de changer de sujet, Vielena dut déployer un effort surhumain pour ne pas éclater de rire.

Au lieu de cela, la jeune femme prit un air horrifié, comme si elle était hors d'elle et se leva d'un coup sec en faisant râcler sa chaise sur le carrelage ce qui attira brusquement l'attention de toute la clientèle. Vielena regarda le jeune homme à la mine pitoyable d'un regard étincelant. Elle pointa un doigt tremblant dans la direction du jeune homme et...

Elle se laissa retomber sur sa chaise en riant à gorge déployée. Et Dieu savait qu'elle avait un rire puissant.

"Non... Pas trop loin." fit la jeune femme entre deux hoquets et en essuyant les larmes qui perlaient à ses yeux.

Et elle se remit à rire de plus belle.

L’employé resta quelques secondes muet. Elle s’énervait, elle se levait, le regardait furieusement… Amsel aurait sans doute tout donné pour être une sourie à cet instant précis. Elle le pointait à présent du doigt et elle… ! Riait ? D’un rire puissant qui plus est. Ce qui attirait, une fois de plus, l’attention des clients autour. Et bien ! Si c’était pour passer une soirée tranquille, pas de doute, ce soir, c’était raté. L’air ébahi, il continuait à regarder la jeune femme rire…

Rassurant. Elle n’avait pas mal prit. Tant mieux. Au début, encore crispé par la première réaction de Vielena, le jeune homme avait juste un rire jaune, léger et forcé quand cette dernière s’était mise à rire. Mais c’était bon à présent, elle riait franchement et avec légèreté. Enfin, tout était discutable. Elle riait franchement, ça s’était sûr, mais la légèreté... Doucement, la pression que le jeune homme s’était imposé s’envolait, s’évanouissant avec les rires.

Puis entre deux hoquets, elle acceptait de changer de conversation. Gentille fille pensait Amsel.

« Pas très loin ? Ah, vous travaillez dans le quartier 0 ? Enfin, oui, évidemment que vous travaillez dans le quartier 0... Question bête. Pas trop fatigante vos journées ? »

Amsel ne savait pas trop à quoi pouvait bien ressembler une journée dans un garage. A vrai dire, jamais cette branche ne l’avait attiré. La mécanique, tous ça… Il préférait largement à jouer à la chimie amusante avec quelques alcools, jus et sirops… C’était bien plus amusant pour lui.

« Ah ! »

Il semblait qu’il se souvenait de quelque chose… D’un sourire désolé, il continua :

« Sincèrement désolé ! Vous venez sans doute ici pour vous changer les idées, et je ne pense qu’à vous faire parler de votre travail ! Il ne manquerait plus que vos collègues soient là et vous n’arriveriez pas à sortir du boulot… »

C’est vrai… Il aimait son activité, et appréciait le patron, mais jamais il n’avait refusé une pause… Et une pause où on ne parle que de son boulot et que son patron reste toujours avec lui… C’était pas une pause.

« D’ailleurs… Ce n’est pas trop dur de travailler dans un milieu comme celui là ? Vos collègues se comportent différemment avec vous ?

Ah ! Excusez-moi…

Je suis trop curieux… »

Un nouveau petit sourire désolé se dessinait sur son visage qui, il y a quelque instant, regardait Vielena avec intérêt et curiosité.

Vielena calma son fou rire et le termina par quelques hoquet en essuyant deux petites larmes qui s'étaient formées aux coins de ses yeux. Elle regardait le jeune homme d'un air toujours très amusé, cependant. Ce "petit gars", comme semblait l'appeler son patron, était vraiment trop poli et semblait avoir toujours peur de mettre les pieds dans le plat. Vielena n'aurait pas dit qu'il ne mettait une pointe de pied dedans de temps en temps, mais il en fallait beaucoup plus pour la vexer. Et à vrai dire, elle-même n'y allait pas franchement avec les gants quand elle s'adressait à quelqu'un. Elle savait qu'elle pouvait parfois blesser quelqu'un, pourtant, même si ce n'était pas voulu, Vielena n'arrivait pas à se comporter autrement. Elle n'arrivait pas à ressembler à autre chose qu'un ouvrier bourru et vulgaire. On ne pouvait trouver Vielena élégante qeulement quand elle ne parlait pas et lorsqu'elle ne bougeait pas. Quand elle dormait, par exemple.

Maintenant que Vielena était à peu près calmée, elle pouvait reprendre une conversation normal avec le sympathique jeune homme.

"Je mentirais si je vous disais qu'être mécano, c'est de tout repos. Les journées sont longues et difficiles et ça donne pas mal de courbature. Mais je me débrouille. Et puis être à moitié mécanisée, ça aide, tout de même. Et quand on trafique un engin, on fait le vide dans sa tête. C'est très reposant et ça permet d'oublier les... soucis du quotidien."

Vielena eut un sourire presque carnassier à l'évocation de ses collègues.

"Rassurez-vous, ça ne me dérange pas d'en parler. Mais eux... En fait, je suis le patron, donc ils ne peuvent pas se permettre de me faire des remarques désobligeantes. Et de toute façon, je n'ai jamais eu vraiment de mal à me faire respecter. C'est pour ça... qu'ils n'aiment généralement pas en parler. pour moi, ce n'est pas difficile, mais pour eux... je ne sais pas."

Vielena éclata d'un rire pas forcément à propos, mais sincère. Elle n'avait pas beaucoup d'employés, mais rien que de penser aux vieux Girard, elle sentait son fou rire revenir. Toujours à grogner et à ruminer celui-là... mais au fond, c'était bien celui qu'elle préférait...

" La patronne ? Oui, forcément, plus de soucis de ce coté là..."

Pas vraiment de mal à se faire respecter... Amsel était certain qu’en effet, elle n'avait aucun mal à se faire respecter. La vision de Vielena qui commençait à s'énerver face à lui, même si ce n'était qu'une plaisanterie, confirmait bien cette pensée. Bah ! Il connaissait pire : Son patron. Son seul et unique collègue en quelque sorte. Il se souvenait d'une fois où ce dernier s'était énerver... Et pour rien au monde il aurait échangé sa place avec le pauvre bougre.

Amsel était persuadé qu'il pourrait faire fuir n'importe qui. Vivant ou non.

"Ah... Patronne, hein ? Ca sonne pas mal pourtant. S'ils n'acceptent pas de recevoir des ordres de votre part... Bin ils pourraient toujours partir, vous ne pensez pas ? Après tout... Il y a bien des métiers plus faciles et moins... »

Il jeta un bref coup d’œil au bras de Vielena.

"Dangereux que mécano. Mais bon ! D'un coté, c'est vrai qu'il existe des gens qui n'aime pas énormément recevoir des ordres et...

- P'TIT GARS !!"

La voie terreuse de M. Barkelner résonnait dans la salle, attirant pendant un bref instant le regard des consommateurs qui retournèrent vite à leurs occupations.

Amsel leva quelque instant le regard au ciel et d'un sourire las...

" Vouii... Patroooon ?
- T'as pas aut'chose à glandouiller ?"

Amsel jeta un rapide coup d’œil à droite et à gauche. Chaqu'un avait de quoi boire, et personne n'était arrivé entre temps.

" Bah non."

M. Barkelner compris alors que le message codé "n'embète pas la dame" n'avait pas été saisie. Le barman se frappa le front et retourna à une autre chope, grommelant.

Amsel le regarda d'un air distrait. Autre chose ? Bah non, y'avait pas de clients... Le ménage, pas avant la fermeture et il y avait de nouveau un stock de bière, sacro-sainte boisson devant l'éternel. Il regarda la jeune femme et leva les épaules.

Après tout... Vielena lui semblait bien être le genre de personne à lui dire elle-même de dégager.

Vielena regarda l'échange entre l'employé et son patron avec curiosité. Le patron était... un vrai patron, pas de doute là dessus. Mais l'employé... Il réagissait avec une désinvolture assez inattendu. Sa réponse était pour le moins culotté pour quelqu'un dont la place en dépendait. Vielena avait vu des patrons virer leurs employés pour moins que ça (Vielena elle-même?). Et la jeune femme s'attendait à voir un litige professionnel sur le champ. Et bien non pas du tout. Le patron choisit le partie de se taire...

C'était curieux, ça. Mais seulement curieux. Il y en avait tant des choses curieuses en ce bas monde... Et tant mieux, sinon, la vie aurait été triste à mourir.

"Dites, c'est assez curieux la relation que vous avez avec votre patron..." dit-elle à voix basse.

Elle jeta un regard en biais au dit patron.

"On dirait qu'il a pas franchement envie de vous contrarier. C'est que vous avez des moyens de pression ou c'est que vous êtes un atout économique majeur?" fit-elle sur le ton de la plaisanterie.

Cependant, cela n'aurait pas été si étonnant. Le jeune homme avait une bouille mignonne et devait passablement attirer les clientes et les fidéliser au point que son patron préfère ne pas le vexer...

Amsel jeta un bref coup d’œil à son patron qui nettoyait inlassablement les choppes et verres. Chaque client, et ce soir ils n'étaient pas nombreux, vaquaient à leurs occupations ce qui ne donnait pas grand chose à faire à M, Barkelner. Ni à Amsel, d'où le fait qu'il parlait gentiment avec une consommatrice.

« Naaaan, rien de tout ça ! C'est juste qu'il n'ena pas l’air, mais il a un bon fond !Il l'avait dit plus fort, sans doute à l'adresse de son patron
-Pasqu'j'en ai pas l'air ? Marmonna le barman
-C'est à cause de votre regard sévère répondit Amsel en souriant, mais l'air sérieux »

Une nouvelle fois, le patron grommela dans son coin tandis qu'Amsel le regardait, l'air amusé. C'était très amusant de se jouer gentiment de lui. L'employé savait aussi où étaient les limites, il les avait très vite comprises. Son patron n'était pas du genre à s'énerver pour peu, dire des petites piques comme il adorait le faire ne l'énerverai pas. Et Amsel savait que si besoin était, il saurait parfaitement se défendre. Peut-être pas par les mots, certes. Il avait la chope facile quand même. Ça ne l'inquiétait pas sur ce point là.

Une cliente se leva alors et pris le chemin de la sortie. Elle lança un bonsoir amical ce à quoi le patron répondu :

« B'soir. »

Et Amsel :

« Bonne soirée, reviens nous voir bientôt ! »

Elle lui fit un petit clin d’œil, avec en guise de réponse, un sourire d'Amsel. Non, Vielena avait trouvé juste. LLe patron hochait la tête e: en plein dans l'mille, m'amzelle... Enfin, y'avait pas que ça non plus, mais ça, pour lui faire cracher...

Puis le jeune homme se tourna vers sa cliente, et le sourire aux lèvres, un sourcil froncé il se risqua à demander, la voix quand même un peu plus assurée qu’auparavant :

« Seriez vous plus sévère avec vos employés ? C'est que, voyez-vous... Si notre comportement vous étonne... C'est que ça ne dois pas être pareil dans votre garage, je me trompe ? »

"Je suis certaine qu'il a bon fond." répondit Vielena en jetant un regard à la fois amusé et bienveillant au patron du bar.

Il ressemblait un peu au vieux Girard, pas physiquement, mais plutôt dans l'attitude. Quoique le vieux Girard s'enfermait dans une carapace d'homme bourru encore plus solide que celle du patron du bar, pensait Vielena. A tel point qu'il fallait parfois... Mmh... Lui ouvrir l'esprit. Et Vielena faisait ça... à sa façon. C'était rarement au goûts des employés, mais Vielena faisait ça uniquement à Girard, elle avait l'impression que cela lui faisait du bien. En tout cas, le vieux bonhomme ne le lui avait reproché ou demandé d'arrêter... Peut-être que lui-même se disait qu'il avait besoin de ça régulièrement pour se remettre d'aplomb?

"Disons que j'ai des rapports un peu plus... musclés avec mes employés. Surtout un..."

Vielena cligna de l'oeil et tira la langue d'un air un tout petit peu gêné. Bah! Ce n'était pas la peine d'avoir des scrupules. Et puis le vieux Girard avait la tête dure. C'était bien pour ça qu'il fallait la secouer de temps à autre...
La jeune femme se souvint avec amusement du dernier dossier qui était... "tombé" sur la tête du vieux Girard. Même s'il avait grogné deux trois fois, il s'était mis au boulot.

Puis, Vielena pensa qu'elle n'était pas que patron. Elle aussi avait des employeur à satisfaire... dans un tout autre domaine. Puisque le jeune homme était lancé sur le sujet et qu'il n'avait rien de mieux à faire, autant poursuivre la conversation...

"Mais vous savez, je ne fais pas que de la mécanique. Cela vous surprendra peut-être, mais j'écris..."

Vielena se balança un peu sur sa chaise et fit craquer les jointures de sa main droite, ce qui rendit un bruit métallique assez curieux.

Amsel attendit une seconde la suite de la phrase. Oui, Vielena écrivait. Bien, bien bien. Quand il s'aperçut que la phrase était finit, il eut une mine d’incompréhension.

" Ah, oui, bien bien..."

Il ne voyait pas trop, sur le coup, le coté étonnant du fait que la demoiselle écrivait. Lui aussi écrivait ! Quand il n'y avait plus d'alcool, il devait bien le marquer sur le petit tableau noir histoire de ne pas répéter 50 fois la même chose. L'écriture de M. Barkelner n'était pas lisible de toute façon. Alors il fallait bien qu'il s'en occupe.
C'était en restant dans ces pensées que soudainement, Amsel eu le petit déclic.

" Écrire ! Oui, bien sûr !"

Il eut un sourie gêné, sans trop savoir si Vielena avait réellement comprit ce qui s’était passé dans sa tête de piaf.

" hélé, Oui, écrire... Je suis bête..."

Passé ce moment embarrassant, Amsel regarda Vielena avec intérêt. Elle écrivait ? Ça, ça pouvait vraiment être intéressant.

" Et vous écrivez quel genre de livre ? Et cela se fait sans trop de difficulté ? J'ai connaissance d'une jeune femme qui a bien du mal à trouver un éditeur. Parce que c'est une femme justement."

A la façon dont Vielena avait finalement fait craquer ces doigts qui avaient donné une jolie note métallique, Amsel craignait que Vielena ne se face éditer par la force. Mais il ne préféra pas vérifier sa théorie. Non, il ne valait mieux pas.

La réaction du jeune homme fut pour le moins curieuse... Vielena le regarda sans comprendre. Qu'est-ce qui avait bien pu lui passer par la tête. La jeune femme se remémorra sa phrase pour essayer de trouver un détail qui clochait...

"... j'écris..."

Mmh, oui, d'accord, c'était pour ça... Vielena eut un rire gêné qui fit écho à celui de l'employé du bar. Le jeune homme était-il simple d'esprit? Non, Vielena pensait plutôt qu'il était un brin... distrait. C'était mignon.
Rien qu'en pensant cela, le rire de Vielena se fit plus franc et plus sonore. Et encore une fois, toutes les têtes se tournèrent vers eux. Quand Vielena riait, impossible de faire preuve de discrétion. Mais qu'est-ce qu'elle y pouvait?

La jeune femme attendit que les autres clients retournent à leurs consommations avant de poursuivre.

"J'écris des romans. Des romans policiers ou fantastique. Ou un peu les deux à la fois."

Vielena en avait écrit beaucoup. Elle était prise dans ce système, dans cette mode du roman feuilleton. Il fallait écrire beaucoup, vite et maintenir un certain suspens. C'était un exercice épuisant et délicat, mais Vielena arrivait tout de même à y trouver du plaisir.

"Je n'ai pas de difficulté pour être édité, car, en fait, mes romans ne sont pas publiés sous mon nom..." avoua-t-elle en toute franchise.

Elle n'en avait pas honte. Elle s'en fichait un peu. On la lisait et on appréciait, c'était tout ce qui comptait pour elle. Après tout, le nom de celui qui écrivait avait-il une importance. Celui qui signait les romans, que gagnait-il, à la fin? Il avait la notoriété et c'était tout. Et que lui apportait la notoriété : des séances de signature d'autographe, la presse sur le dos, une vie privée restreinte... Et tout cela, sans le plaisir d'écrire, sans le bonheur d'être lu et de donner du plaisir. Finalement, la situation de Vielena restait assez avantageuse, à son goût.

Mais le jeune homme qui l'écoutait n'était peut-être pas du même avis... Ou peut-être qu'il s'en fichait.

" Hein hein... Et cela ne vous pose pas de problème ? Car je veux dire... La première impression que vous pourriez donnez de vous ne serait-elle pas meilleur si les gens savaient que vous écriviez ?"

Toujours bien lancé dans ces bourdes en parlant, Amsel pensa que tout de même il faisait fort ce soir. Les bourdes, oui, ça le connaissait, il était quelque peu malhabile des fois avec les gens qu'il ne connaissait pas bien, mais ce soir, c'était gratiné.

" Non pas que l'image que vous donnez de vous soin mauvaise ! Elle est juste un peu..."

Amsel regarda au plafond en faisant tourner sa main dans le vide. Il s'était décider à ne pas refaire de boulette, au moins pour cette fois ci. Car là, franchement, Vielena aurait bien de quoi ne pas revenir avec tout ce qu'elle pouvait avoir entendu ce soir...

" Un peu, un peu... Heu..."

Ne pas trop hésiter non plus, il fallait être franc, après tout.

" Un peu dur, je dirais... Sans vouloir vous offenser ! s'empressa t-il de rajouter. Vous êtes vous même, et ça a son charme, je dirais pas le contraire !"

D'un autre coté, la jeune femme paraissait être satisfaite de son cas. Il n'avait ressentit aucune amertume dans sa voix quand elle lui avait expliqué qu'elle était édité sous le nom d'un autre. C'est vrai que, passer dans la rue, se faire aborder par tout le monde pour signer un autographe ou il ne savait quel autre devoir farfelue d'écrivain pouvait également être gênant et pas forcément attractif.

" Remarquez ! L'anonymat à du bon aussi ! L'important au final est que vous vous y retrouviez !
Dîtes moi, cela vous dérangerait-il de me donner quelques titres de vos livres histoire que je lise dans les moments où je n'ai rien à faire ?
- Tudju ? Mais t'as aut'chose à faire ! Grogna le patron
-Bien que j'ai autre chose à faire ?" Acheva le jeune homme

Il trouva quand même que son patron avait l'oreille hautement selective ce soir...

La réaction du jeune homme était amusante, comme toujours. Mais cette fois, Vielena s'abstint d'éclater de son rire bruyant. Le "p'tit gars" était gêné d'aborder la question du manque de féminité de Vielena. Il n'y avait pas de quoi. Au contraire, pour une fois qu'un homme ne se dressait pas un mur d'illusion devant les yeux quand il la voyait... Vielena appréciait. C'était si rare qu'on la voit telle qu'elle était. Elle laissa échaper tout de même un petit rire sarcastique.

"Vous voulez dire : un peu virile? Ne mâchez pas vos mots, avec moi, ce n'est pas franchement la peine. Par contre, quand vous dites que ça a son charme, vous avez intérêt à être sincère, sinon, je risque de me fâcher...[b]"

Vielena tira la langue au jeune homme, histoire de lui signfier qu'elle était encore très loin d'être fâchée.

"[b]Le problème, c'est que si je dis tout de suite aux gens que j'écris, ils vont justement se faire une fausse image de moi. Y a déjà suffisament d'imbéciles comme ça, pour me prendre pour un mythe vivant. Alors... j'exagère peut-être un tout petit peu mon côté masculin. Mais ça reste quand même dans ma nature. Alors..."

Vielena s'interrompit pour jeter un oeil au fond de sa chope : vide.

"Alors... Une autre bière patron!"

Tous les clients du Casse-Dalle sursautèrent en même temps et Vielena éclata de son rire si peu crystallin, s'attirant quelques regards noirs.

"Alors... Vous vouliez savoir ce que j'ai écrit? dit la jeune femme en laissant tomber lourdement son pied droit sur la table afin de se balancer un peu sur sa chaise. En fait, tous les livres signés Neil Ghostam sont de moi. J'en ai écrit pas mal. Le premier, c'était "Le Chat". Bon, je ne vous le conseille pas spécialement, je le trouve un peu maladroit. Sinon, y'a "Misthill", "Le Maître et l'Élève", "Lunan"... Entre autres. Je serais ravie si vous lisiez l'un de mes livres... "bien que vous ayez autre chose à faire"..."

Sur ces mots, Vielena jeta un regard malicieux dans la direction du patron du bar.

Amsel haussa les épaules.

" C'est parce que je dis trop ce que je pense que je suis maladroit. "

Il avait finit par mettre ces mains dans les poches, ce que son patron regarda avec de grands yeux. Bien que lui tournant le dos, l'employé sentait ce regard lourd de reproche. Il eut un petit sourire mesquin en regardant sur le coté, signe que ça l’amusait beaucoup. La jeune femme ré-attira son attention quand elle commanda la bière.

Amsel eu un visage crispé quelque seconde. La malheureuse, elle ne savait pas ce qu'elle venait de faire. En effet, le patron, le regard brillant, regardait sans commune mesure son employé. Finit les "j'ai rien à faire" car là, si si, il avait quelque à faire ! Servir ! Il stoppa net son frottage de choppe et s'avança légèrement, lançant des regards à son employé qui semblait affairé à ne pas écouter.

Ce dernier avait prit un petit calepin, sorti d'une poche, et avait commencé à noter calmement les titres de livres que Vielena donnait. Quand elle eut finit, il se tourna pour voir que non seulement son patron ne faisait plus rien, mais en plus, que si la jeune femme voulait sa bière, il faudrait qu’il y aille lui-même. Il bougea pour se diriger vers le bar, sous le sourire toutes dents dehors de son patron. Amsel eu un sourire en coin en saisissant la bière que lui tendait son patron, et ajouta rapidement :

" Attention de ne pas user la choppe à force de la frotter, vous qui êtes terrasé par tous ce travail !"

Et il se re-dirigeai rapidement vers Vielena, esquivant les regards noirs de son patron. En déposant sa consommation à sa cliente, L'employé ajouta :

" Vous avez de la chance, c'est vraiment calme ce soir... Quoi que c'est agréable également quand il y a du monde."

C'était vrai... Principalement une cliente à servir, c'était plus que calme. Les gens partaient, d'autre parlaient calmement entre eux autour d'un verre et un autre ronflait sur le bar, déposant un filet de bave que le jeune homme devrait laver à la fermeture. Vraiment, très très calme.

" Mais merci bien pour les titres des livres, je tacherais de les lire."

Il eu un sourire amusé

" Mais dîtes moi... Ca en fait des activitées... Le garage, l'écriture... Vous avez encore des journée à vous ou alors ce n'est pas tout niveau activité ?"

Bon, a priori, le « ptit gars » (décidément, Vielena allait sans doute l’appeler comme ça, elle aussi) était sincère quand il disait que sa… « virilité » lui allait bien. Tant mieux. Les flatteries, ça ne prenait pas franchement, avec elle. Mais un compliment sincère, c’était toujours bon à prendre, c’était si rare.

« Et bah si vous êtes sincère, je vous remercie, c’est gentil. »

Vielena réussit à adresser un sourire un peu plus féminin au jeune homme. Mais dès que la chope lui fut apportée, Vielena perdit toute féminité en buvant goulûment sa bière. Bon, elle restait propre, quand même, elle n’en faisait pas couler partout, non plus.

La jeune femme reposa sa chope et consulta l’heure sur sa vieille montre à gousset. Elle devait peut-être rentrer chez elle pour dormir. Car comme disait le p’tit gars, elle en avait des activités… Et bien plus qu’il ne le croyait. Elle était vraiment en permanence en train de travailler. Les vacances, elle ne connaissait pas vraiment. Son temps libre était fait pour manger et dormir. Et de toute façon, qu’aurait-elle fait de ses journées ? Vielena était une femme d’action et resta sans rien faire était un calvaire pour elle.

Allez ! Rien de mieux qu’un peu de sincérité pour mieux cacher la vérité…

« Je n’ai pas d’autres activités professionnelles, si c’est ce que vous voulez savoir… Et je ne vois pas comment je pourrais en avoir d’autre. Mais même pendant mon temps libre, il faut que je bouge, que je fasse quelque chose. Par exemple, j’aime bien me balader à Trockenstadt, c’est une ville que j’apprécie. »

Quoi de plus normal ? Satisfaite d’elle-même, elle finit d’une gorgée sa chope de bière et la fit retomber assez lourdement sur la table.

« Je crois que je vais vous laisser… Le sommeil m’appelle. »

Avec un sourire, Vielena retira son pied droit de la table et se leva.

« Ouch ! »

Ses jambes étaient un peu décalées… Elle remua ses hanches et ses jambes. Dans un cliquetis rapide, tout se remit à peu près en place. Il fallait vraiment qu’elle fasse faire une révision…
Elle fouilla la poche droite de son pantalon et en sortit une poignée de pièces de monnaie. C’était plus qu’il n’en fallait, mais Vielena déposa tout sur la table.

« Gardez la monnaie, pour le pourboire… Sur ce… Je vous laisse à votre inactivité. »

Avec un dernier sourire, Vielena tourna les talons et sortit du bar. Elle reviendrait sans doute souvent ici. Il y avait une bonne ambiance et le serveur était sympa et rigolo. Et la bière était bonne. Si ça, c’est pas un argument.

Vielena claudiqua à travers les rues de Hochstadt jusqu’à son appartement.

" Ha ha, Inactivité ! Tout de suite les grands mots !"

Amsel ria de bon coeur alors que son patron le regardait, souriant presque. Même s'il ne le montrait pas, M.Barkelner était content que son employé soit de retour. Toujours sans le montrer, il l'appréciait, le jeunot savait mettre de l'ambiance. Même s'il y avait de fois des gens étranges qui venaient le voir ou qui laissaient au patron des messages aussi étrange qu'eux, messages qu'il redonnait ensuite à Amsel.

Ce dernier adressa un petit sourire à Vielena qui quittait le bar.

" Merci beaucoup et au revoir !"

Il espérait bien la revoir. Elle était gentille et intéressante la demoiselle. Et généreuse ! Amsel recompta par deux fois ce qu'elle avait donné en pourboire. Son patron s'y intéressa.

" Elle nous a donné combien la p'tite demoiselle ?
- Rien qui puisse se partager..."

Oh, bien sûr que si, mais le patron n'était pas un voleur, il laissait son employé empocher tout les pourboires qui lui revenait. Le Casse-Dalle n'était pas une grosse industrie, le peu qu'ils gagnaient allait dans les fournitures et dans deux maigres salaires. C'était un autre truc qui faisait que le patron garderait Amsel aussi longtemps que possible : il était payé une peau de misère et ne s'en plaignait pas malgré le bon travail effectué.

Amsel ramassa la chope d'une main, d'une autre il passa un coup de son tablier sur la table. Plus par habitude que par nécessité. Enfin, il se dirigea d'un pas lent vers son comptoir et sortie d'une poche un petit carnet. Il avait une figure incroyablement sérieuse au moment où il prit un crayon et griffonna sur le carnet :

Nom : (à voir au garage, peut-être une indication.)
Prénom : Vielena
Age : entre 25 et 30 ans physiquement.
Métier : garagiste/ écrivain (écrit sous le nom de Neil Ghostam, voir lecture "le chat", "Misthill", "Le Maître et l'Élève", "Lunan")

Il hésita un instant.

* Professionnellement, pas d'autre activité, hein ?*

Amsel analysait ça comme lourde en sous entendu. Il continua à griffonner :

Autre activité à envisager... Activité dangereuse. Clan ?
Particularité

Le jeune homme eu une minute d'hésitation. Il analysa une seconde ce qu'il s'était passé ce soir. La demoiselle avait un corps pas naturel. Et combien même elle n'avait pas nié le bras, il devait y en avoir plus. Il soupira un instant.

Particularité : Corps en partie mécanisé.

Il se mit enfin à faire un petit dessin, que certain qualifierait d'abstrait et nota le physique de la demoiselle. Quand il eu finit, il clappa le carnet et eu un petit sourire en coin, regardant là où la miss avait disparut.

" J'espère bien vous revoir miss" murmura-t-il.

Sortant son nez du filet de bave, l'homme au chien pleurnicha :

" Pau... Pauline ! Snirf"

Amsel lui tapota le dos en lui souriant

" Mais oui, mais oui !"